Corps écrit

Corps écrit

Imprimer la fiche
Taguieff (Pierre-André) > La Couleur & le sang. Doctrines racistes à la française (1998)

Présentation

Pierre-André Taguieff, La couleur et le sang. Doctrines racistes à la française, Mille et Une Nuits, 1998.

Détails
La Couleur et le sang aborde le problème de la responsabilité de ces théoriciens français qui sont tous morts avant la Seconde Guerre mondiale, dans l'exploitation criminelle ultérieure de leurs théories. Les contemporains de Gobineau, de Lapouge et de Le Bon n'avaient pas manqué de pressentir les dangers de telles analyses.
Etude comparée des itinéraires de Joseph Arthur de Gobineau (1816-1882), Gustave Le Bon (1841-1931) et Georges Vacher de Lapouge (1854-1936). Récupérées et transformées, leurs doctrines ont nourri les racismes du XXe siècle ; nazis en particulier.

Gobineau décrit une inéluctable décadence provoquée par le mélange des races, mélange auquel il reconnaît néanmoins un certain mérite dans le développement de la civilisation. Gustave Le Bon se livre à une reformulation de la doctrine de l'inégalité des races dans le cadre de l'idéologie évolutionniste. Vacher de Lapouge se fait le défenseur d'un projet eugéniste de régénération de la race. Pierre-André Taguieff distingue, dans ces systèmes, ce qui relève d'une vision du monde, d'une idéologie politique – le « racialisme » –, de ce qui est de l'ordre programmatique ou normatif, le racisme au sens strict.

Il ressort de la synthèse exposée par Taguieff que la prétention à la scientificité de ces trois penseurs a fait long feu. Malgré la diffusion massive des travaux de Gustave Le Bon & l'influence du psychophysiologue Jules Soury au tournant du siècle, la France n'a pas connu d'équivalent de la « science nazie », produite par des courants entiers de l'Université allemande dont les travaux confluèrent avec l'idéologie national-socialiste. Taguieff insiste sur l'attitude de théoriciens nazis qui, tout en se réclamant des trois hommes, s'en sont montrés des disciples peu scrupuleux.

Le racisme du XXe siècle ne peut donc être évacué du champ idéologique français en le décrivant comme une spécificité allemande qui aurait marginalement contaminé la société française sous la pression de l'occupation militaire par les armées du IIIe Reich. Le national-socialisme a lui-même emprunté aux théoriciens français du racisme, qu'il a volontiers présentés comme des « prophètes » re incompris dans leur propre pays.
La Couleur et le sang contribue, avec Zeev Sternhell et Pierre Birnbaum, à éclairer la dimension européenne de la naissance des idéologies fascistes.