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L'école des souvenirs
Régine Detambel
L'école des souvenirs
Récit-reportage

Date : 2007
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Présentation

L’école des souvenirs m’a été commandé en 2007 par le Conseil général de l’Ain. Voici l’histoire de sa réalisation, en quelques mots de Céline Carrier, alors directrice de la Bibliothèque départementale de prêt de l’Ain.
«A l’origine de ce projet, nous souhaitions proposer aux résidents de la maison de retraite de Nantua des rencontres au cours desquelles ils pourraient, aidés de livres, photographies et objets, convoquer leurs souvenirs et échanger sur le thème de l’école. L’acte d’écrire devenant difficile dans le grand âge, nous avons mis en place des ateliers de mémoire et de «parole».
En novembre 2007, l’animation de ces ateliers fut confiée à Régine Detambel, qui avait accepté avec enthousiasme de participer à notre projet. Une visite au Musée du Revermont, en compagnie de l’écrivain et de quelques résidents, constitua une belle introduction aux rencontres prévues dès le lendemain : les premières réminiscences furent recueillies dans la salle de classe reconstituée, dont certains objets illustrent cet ouvrage.
Durant ces ateliers, les personnes âgées nous ont livré, avec émotion, leurs récits «d’écoliers», que l’écrivain a pris soin de transcrire afin de pouvoir les faire partager au plus grand nombre.
Dans cet objectif, cet ouvrage, ainsi qu’une exposition, ont été réalisés pour être largement diffusés. Ils témoignent du temps de l’école telle que l’ont connue les résidents entre 1920 et 1940.» (Céline Carrier)

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L’école des souvenirs

Par Régine Detambel © et les résidents de la maison de retraite de Nantua

Extrait

être de la vieille école

Un mot ne peut définir qu’une porte très étroite, une fente. Un mot est une brèche. Pourtant on continue de nommer imperturbablement “vieillesse” celui qui définirait une tranche d’âge franchissant tous les précipices de soixante à cent vingt-deux ans, un mot-ère couvrant les soixante-deux années qui courent depuis l’âge de la retraite jusqu’à la mort de Jeanne Calment, un mot jeté comme un viaduc par-dessus des êtres vivants et aimants, habités par ce quelque chose de très ancien qu’est l’amour de la vie, un mot qui brasserait, dans un même cliché, ces personnages et leur chair, jusqu’à transmuer enfin tout cela en sainte et sacrée généralité. Certains s’emploient sérieusement à chercher ce mot apte à qualifier un morceau de mythe. Le mot vieillesse n’est pas apte à rendre compte de la totalité du réel (le prisme de ses couleurs, ses moirures). Le mot vieillesse n’est que la voix de la Raison.
Alors nous avons tenté d’accoler à ce mot incomplet l’adjectif “scolaire” et nous avons goûté, des heures durant, à cette extraordinaire vieillesse écolière, émue devant un encrier de porcelaine ébréché ou touchant du doigt, émerveillée, une plume gauloise (“Oui, je la reconnais, j’avais la même !”), un crayon à ardoise (“C’était si fragile, j’avais cassé le mien !”), un abécédaire au point de croix, un exemplaire de la Méthode de lecture, premier livret. Ecriture, exercices d’intelligence, Delagrave éditeurs, Paris…

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