Propositions d'écriture

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Acrostiche

Présentation

ACROSTICHE

Un acrostiche est un poème dont les lettres initiales des vers forment un mot ou une phrase lisible de haut en bas. On en trouve, entre autres, dans la Bible (Psaumes 33 et 118) et chez de nombreux auteurs latins. Le poisson, symbole du Christ, tire son origine de la formule Iêsus Christos Theou Uos Sôtêr (Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur). Les lettres initiales de cette phrase forment le mot ICHTHUS, qui signifie poisson en grec. De son côté, Guillaume Apollinaire adressa ce poème à Lou :

La nuit descend
On y pressent
Un long destin de sang.

Ce procédé permet également de dissimuler des messages.
Voici un poème adressé à George Sand par Alfred de Musset :

Quand je mets à vos pieds un éternel hommage,
Voulez-vous qu’un instant je change de visage ?
Vous avez capturé les sentiments d’un coeur
Que pour vous adorer forma le Créateur.
Je vous chéris, amour, et ma plume en délire
Couche sur le papier ce que je n’ose dire.
Avec soin de mes vers lisez les premiers mots :
Vous saurez quel remède apporter à mes maux.

Et George Sand, dit-on, répondit ainsi :
Cette insigne faveur que votre coeur réclame
Nuit à ma renommée et répugne à mon âme.

Des billets doux qui réconcilient définitivement messageries roses et rhétorique ...
 
L’acrostiche, cette insigne faveur que votre coeur réclame
"Ça, un poëte ? Il serait refusé à un concours d'acrostiches !" écrivit Jules Renard, dans son Journal, à la date du 24 novembre 1887. En voilà suffisamment pour comprendre que l’acrostiche n’a pas une très grande valeur poétique. Alors, d’où vient la vogue multiséculaire de ce jeu de mots, d’esprit et de salon ?
L’acrostiche (du grec akros, extrême, et stichos, vers) désigne primitivement un poème dont les lettres initiales des vers, lues verticalement, donnent le mot pris comme sujet. Il s’agit de la définition officielle de l’exercice. Mais de quand date cette curiosité littéraire ?
On en trouve, entre autres, dans la Bible (Psaumes 33 et 118) et chez de nombreux auteurs latins. Les comédies de Plaute sont précédées d’un argument en vers dont les premières lettres forment le titre de la pièce. Le poisson (ikhthus), symbole des premiers temps du christianisme, est le nom obtenu en prenant les initiales des mots grecs (Iêsus Christos Theou Uos Sôtêr) signifiant : Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur. Il y a également un acrostiche dans l’inscription I.N.R.I. (l’incontournable des mots-croisistes) placée sur la croix et signifiant Iesus Nazarenus Rex Iudeorum. Au Moyen-Age, l’acrostiche est très employé dans les écrits des monastères. Dante, dans La Divine Comédie, met ainsi en relief le mot uom (ou uomo : homme) dans un passage du Purgatoire, au chant XII. A la Renaissance, l’acrostiche abandonne le latin et retrouve des sujets profanes. Il fleurira surtout aux XVIIe et XVIIIe siècles pour louer les mérites des grands ou tourner des compliments. Parmi les modèles du genre, l’acrostiche le plus connu, adressé à Louis XIV par un poète sans le sou, mais sachant certainement en réclamer avec hardiesse :
Louis est un héros sans peur et sans reproche
On désire le voir. Aussitôt qu’on l’approche
Un sentiment d’amour enflamme tous les coeurs ;
Il ne trouve chez nous que des adorateurs ;
Son image est partout excepté dans ma poche.


Il est possible encore de compliquer les choses en créant un acrostiche double, pouvant se lire par les deux bouts ! Témoin, ce poème d’amour :
Amour parfait dans mon coeur imprimA
Nom très heureux d’une que j’aime bieN
Non ! non jamais, cet amoureux lieN
Autre que mort défaire ne pourrA


Mais c’est fort probablement Guillaume Apollinaire qui fit rendre au rigide acrostiche tout ce qu’il pouvait offrir de touchant et de sublime. A Linda, dont il était amoureux, il écrivit :
L’ombre de la très douce est évoquée ici
Indolente et jouant un air dolent aussi :
Nocturne ou lied mineur qui fait pâmer son âme
Dans l’ombre où ses longs doigts font mourir une gamme
Au piano qui geint comme une pauvre femme.