Billets du lever

J'ai écrit cet autoportrait il y a déjà plus de dix ans, dans Décousures, et il m'est revenu sous les yeux ce matin, au hasard d'une connexion sur un site littéraire ami. Je comprends maintenant ce que j'ai voulu dire autrefois par en suspens, car j'ai trouvé ce portrait effroyablement "ressemblant" malgré le temps passé depuis sa composition. 

Autoportrait en suspens

Fluette en apparence petite forme
je me vois nage
à peine un soupçon d’aspect
mais nourrie et soutenue
défiée et suspendue
ayant défié déjà les oscillations
de huit lustres
leurs flux leurs feux
(j’ai bien failli me tuer — deux fois — comme enfant)
chaque mort porte en elle sa glace
toutes récapitulées dans le cristal

Mobile un assemblage
le cloître brisé du thorax
avec la peau comme espace
et des coutures comme lieu — comme nudité de lieu
à un poil près
l’œil ballon
le bourgeon éclate en visage et ça parle
la partie habitée coopère avec l’opposée
la force palatine des seins — des vivants pas trop en relief
qui regardent la lumière

Pas vésuvienne ni amateur de va-du-gland
mais sensible trop — d’une sensibilité sur pilotis
au côté sans répondant du papier
— ma tête sur tige & la perfection de la boîte
le pendule qui se nomme poème
est un bond sur le mur
sa pierre qui roule
jusqu’à l’inaccessible cavité du repos
au milieu du chemin