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Werner (Abraham Gottlob) > XIXe. Académie des Mines de Freiberg (Saxe), Humboldt

Présentation

Abraham Gottlob WERNER (1749-1817)

Toute science pour se constituer nécessite de : trouver un système de pensée théorique, qui soit doctrine explicative et vision du monde, en avance sur la rencontre des faits ; se donner un vocabulaire et une taxinomie, description précise, inventaire et mise en ordre des faits fournissant une méthode d'investigation logique et un cadre pour les programmes de recherche, tout en unifiant la communication grâce à un langage commun. La géologie moderne est née, au XIXe siècle, de la synthèse entre la vision inductive de l'Écossais Hutton et la méthode analytique de l'Allemand Werner, surnommé le Linné de la minéralogie et de la géologie ; il fut aussi le génial pédagogue de la génération qui allait se lancer avec enthousiasme, à l'aube du XIXe siècle, dans l'exploration objective, intensive, coordonnée de la géologie structurale et régionale de l'Europe et du monde (cf. Alexandre de Humboldt).

Systématique du monde minéral
Abraham Gottlob Werner fit ses études à Freiberg, puis à Leipzig, où il s'ouvrit aux Lumières. Toute sa vie il restera un libéral, un humaniste. Ce déiste épris d'ordre deviendra sur l'idole des jeunes romantiques allemands, dont Novalis.
Homme d'une prodigieuse érudition, linguiste polyglotte, numismate, bibliophile, il fut, très jeune, nommé inspecteur des Mines et chargé de cours de minéralogie et de sciences minières à l'Académie des mines (Bergakademie) de Freiberg en Saxe. Cet institut venait d'être fondé (1765) pour développer l'exploitation du riche district minier de l'Erzgebirge. Werner allait jusqu'à sa mort, en 1817, élever cette modeste école technique provinciale au rang d'un des hauts lieux culturels de l'Europe.

Au sortir du Moyen Âge, la corporation franche des artisans mineurs germaniques (notamment saxons) avait joué un rôle dans la remise en route des exploitations minérales d'Europe. Werner reprendra la solide tradition de son compatriote Agricola : partir de la réalité concrète du sous-sol et des affleurements de surface ; collectionner, identifier, décrire, nommer, classifier les minéraux d'abord, puis les divers types de roches (granite, gneiss, basalte, grauwacke). Ces roches sont considérées comme des parties intégrantes de l'écorce terrestre, des manières d'être de la substance des montagnes, et leur étude forme les divers chapitres et paragraphes d'une gîtologie (science qui étudie les gisements) généralisée à tout le contenu minéral utile et stérile. Minéraux et roches, en effet, sont les éléments constituants de gisements. Certains sont d'extension générale ; d'autres, au sein des précédents, sont des gîtes particuliers comprenant aussi bien les assises différenciées mineures de natures diverses que les filons sécants. La « géognosie » consiste à reconnaître méthodiquement ces corps minéraux en déterminant leurs relations de gisement = techniques qu'utilisera Alexandre de Humboldt dans l'Oural et en Amérique du Sud.

Un modèle étagé universel
Werner affirme que les formations générales s'observent toujours dans un ordre de superposition constant. Il se défend de bâtir une « théorie de la Terre ». C'est uniquement d'après l'enseignement du terrain qu'il fait siennes les idées de Torbern Olof Bergman, Johann Gottlob Lehmann, Georg Christian Füchsel et Pyotr Simon Pallas sur la constitution de l'écorce terrestre. Les montagnes comprennent, selon lui, de bas en haut et de leur centre vers les plaines : un cœur granitique, puis gneissique et micaschisteux qui est l'Urgebirge, c'est-à-dire la « formation primordiale » ou « primaire », dont Werner séparera une formation de transition, faite surtout de schistes et de grauwackes ; en contrebas et à plat, une formation de roches sédimentaires variées (« secondaire ») ; enfin, les terrains de la « formation de délavage », composés de graviers, de sables. L'ensemble résulte tout uniment de précipitations successives des substances dissoutes ou remaniées au sein d'un océan universel en retrait progressif, y compris les granites et les couches basaltiques interstratifiées à divers niveaux ; les filons eux-mêmes ne sont que des fractures remplies per descensum par voie humide.
Cette conception pan-neptunienne, atectonique, devait donner une grande impulsion à la stratigraphie naissante : « Notre Terre est fille du temps et s'est formée graduellement. » 
L'affirmation par Werner d'une unité mondiale de constitution lithologique selon un modèle étagé est l'apport fondamental.

Werner fonde le neptunisme
Le neptunisme est une théorie géologique obsolète de la fin du xviiie siècle, proposé par Abraham Gottlob Werner. Dans le courant du XIXe siècle elle fut opposée au plutonisme de James Hutton puis à l'actualisme.
Cette théorie est nommée d'après le nom du dieu de la mer Neptune. Elle explique la formation de la croûte terrestre par précipitation de sédiment dans un océan primordial couvrant toute la surface de la Terre. Cet océan en se retirant aurait laissé les continents dans un état proche de celui que nous connaissons actuellement.
Les deux théories, neptunisme et plutonisme, sont quelque peu exagérées. Les roches et les minéraux peuvent être le produit de ces deux mécanismes mais aussi du métamorphisme.