Corps écrit

Florence Dupont, L'orateur sans visage. Essai sur l'acteur romain et ses masques, PUF, 2000.

> Présentation de l'éditeur
Le théâtre romain est le continent noir de notre mémoire culturelle. Longtemps refoulé, était-il si gênant ? Parce qu'il était un théâtre du jeu, ce qui choque notre goût pour les théâtres du sens et de la représentation ? Notre désir d'un théâtre antique qui pourtant nous parlerait de nous ? Parce qu'il exigeait des acteurs-parias, sans identité civique ou sexuelle, flexibles et relâchés, ce qui choque notre conscience humaniste et normative ? Ou bien, et la faute serait plus grave, parce que le théâtre romain remettrait en cause notre conception de la théorie comme " discours sur " ? En effet, les spectacles scéniques romains pourraient bien avoir servi à fonder théoriquement l'éloquence politique sur laquelle reposait toute la conception romaine d'un pouvoir politique libre et élitaire. Etrange façon de philosopher par une pratique ludique mais qui s'explique par le fait que Rome est une culture des corps présents, où le discours ne s'objective pas en un logos autonome mais se confond toujours avec l'homme éloquent.

> Sommaire
Introduction : Oublier Rome ?
1. Les théâtres du jeu
2. L’infamie des histrions
3. Théâtre et politique
4. L’acteur peut-il être un orateur ?

Première partie : Un couple infernal
Chapitre I : Roscius et Cicéron
1 L’actio romaine n’est pas l’hupokrisis grecque
1.1 L’hupokrisis
1.2 L’actio
2 Un témoignage à déchiffrer
2.1. La sententia lieu commun de la mémoire
2.1.1 Cicéron et la sententia oratoire
2.1.2 Elocutio
2.1.3 Roscius et la sententia dramatique
2.2. Actio et imitatio
3 Rome, culture de l’improvisation
3.1 Improvisation oratoire
3.2 Improvisation scénique
3.3 L’alchimie du convenable
4 Le geste et l’action
5 Les enjeux d’un contre-sens volontaire
Chapitre II : L’histrion ou l’Autre absolu
1 Histrionie
1.1 Jupiter joue la comédie
1.2 Le banquet sur le forum1.2.1 La danse de Pseudolus
1.2.2 La danse de Gabinius
1.3 La confusion des espaces
2 L’infamie de Roscius
2.1 Une exclusion juridique et morale
2.2 Comment Cicéron parlait de Roscius
3 La beauté de l’histrion
3.1 Venustas et mollitia
3.2 Doctrina
4. L’Autre

Deuxième partie : Le miroir de l'âme
Chapitre I : L’éloquence romaine est une praxis
Chapitre II : La dignité de l’orateur
1 Le patronat judiciaire et l’exercice de la libertas
2 La formation de l’orateur : le corps masculin de la liberté
2.1 Le langage des pères
2.2 La politesse du corps
3 La colère et la pitié : la rhétorique du sublime
Chapitre III : Le visage vrai de l’orateur
1 Le face à face social
1.1 Exspectatio
1.2 Le visage porte l’identité de l’orateur
2 Les mouvements de l’âme
2.1 Définitions
2.2 Le mouere oratoire et les mouvements de l’âme
2.3. Le visage, “miroir” de l’âme
2.4 Le discours de l’âme
3 La matérialité active du discours
3.1 la contagion des mouvements de l’âme
3.2 La préparation des mouvements de l’âme3.3 Le corps de l’accusé et le corps du patronus
Chapitre IV : Cicéron cherche actio désespérément

Troisième partie : La voix des masques
Chapitre I : Aesopus et ses masques
1 Du visage au masque
1.1 Prosopon et persona
1.2 Suspense
1.3 L’épithète tragique
2 Retour au mouere
2.1 La force du signifiant
2.2 Les émotions de l’histrion
2.3 Le jeu du masque
Chapitre II : Des super-marionnettes pour des émotions inouïes
1. Fragmentations
1.1.L’orateur décomposé
1.2. Sémiologie de l’âme
2 La voix de l’acteur
2.1 La voix miroir d’une âme virtuelle
2.2 La douce voix du tragédien
2.3 Aesopus et ses banquets
3 Dramaturgie de la fragmentation
3.1 Le “parler faux” : les prologues tragiques
3.2 Détour par la tragédie grecque
3.3. Célébration de la douleur
4 Voix tragiques dans les traités de rhétorique
5 Fonction heuristique et classificatoire des super-marionnettes
Chapitre III : L’animation des images
1 Le geste et la voix
1.1 Rhétorique de l'image fixe : un objet de mémoire
1.2 Des tableaux qui parlent : le prologue des Troyennes, 1-632 Une dramaturgie de la désillusion
2.1 La mort d'un masque, Œdipe, 998-1042
2.2 Ceci n'est pas un sacrifice Oedipe, 208-402
2.3 Ceci est un faux débat. Médée, 179-300C

Conclusion : "Ceci n’est pas une pipe" : Apprentissages, jeux et théories à Rome
1 Imitation et représentation
2 Apprentissages, jeu et fiction
3 Fonction théorique d’une pratique: le rituel des jeux
4 Tout le visible n’est pas réel

Bibliographie