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Kierkegaard (Sören) > Johannes Climacus ou Il faut douter de tout

Présentation

Søren Kierkegaard, Johannes Climacus ou Il faut douter de tout, traduit du danois par Else-Marie Jacquet-Tisseau, Rivages Poche / Petite Bibliothèque, Rivages, 1997.

> Présentation de l'éditeur
"Dans la ville de H... vivait, il y a quelques années, un jeune étudiant nommé Johannes Climacus ; il ne cherchait nullement à se faire remarquer dans le monde, n'ayant d'autre joie que de vivre retiré et tranquille. Ceux qui le connaissaient un peu mieux cherchaient à expliquer par la mélancolie ou par l'amour cette nature renfermée qui fuyait tout contact durable avec les hommes. Les partisans de la dernière hypothèse n'avaient pas entièrement tort : ils se trompaient cependant en prenant une jeune fille pour l'objet de ses rêves."
Ainsi commence cet extraordinaire conte inachevé de Kierkegaard sur les désarrois du jeune Climacus, emporté par une insolite passion : la passion pour la philosophie.

> Mes notes à propos du corps de l'écrivain marcheur
« Produire fut ma vie » « J’écris à corps perdu « Je sens que ça remue en moi » « J’ai la rage d’écrire. »
 Kierkegaard notait les remarques qui lui venaient à l’esprit, il avait résolu, à l’instar des grands auteurs, comme Hoffmann ou Lichtenberg, de consigner les idées qui se présentaient à lui « avec le cordon ombilical de l’inspiration première », d’autant que « certaines idées ne surgissent qu’une fois dans la vie ». Kierkegaard travaillait une grande partie de la nuit. On pouvait le voir, depuis la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vastes appartements de Norregade, au centre de Copenhague. Dans chaque chambre, il avait un travail en chantier et y avait fait disposer une écritoire, des plumes et du papier, de façon à pouvoir noter, au cours de son interminable promenade, les phrases qu’il venait de composer en marchant. « J’écris à corps perdu » disait Kierkegaard avant de camper la figure de Johannes Climacus, héros de Il faut douter de tout. C’est la vie qu’il menait dans la maison paternelle qui contribua à développer l’imagination du garçonnet Johannes et à le rendre philosophe, tout entier réflexion, du commencement à la fin. Le père de Johannes lui refusait souvent la permission de sortir. Mais, parfois, en manière de compensation, il lui offrait de le prendre par la main et de faire une promenade ensemble, en arpentant le parquet de la pièce. Johannes était libre de choisir le lieu de la destination. Johannes optait pour la porte de la ville, pour un château du voisinage. Alors, tout en allant et venant sur le parquet, le père décrivait tout ce qu’ils voyaient, ils saluaient les passants, les voitures les croisaient à grand fracas et couvraient la voix du père, qui racontait avec tant d’exactitude et de vie, de façon si présente, si minutieuse et évocatrice, qu’après une demi-heure de cette promenade avec son père, l’enfant était recru de fatigue, comme s’il avait été toute la journée dehors.
Climacus est Kierkegaard. Même besoin d’excitation musculaire dans la création chez Kierkegaard, qui travaillait une grande partie de la nuit. On pouvait le voir, depuis la rue, arpenter longuement les pièces illuminées de ses vastes appartements. Dans chaque chambre, il faisait disposer une écritoire et du papier, de façon à pouvoir noter, au cours de son interminable promenade, les phrases qu’il venait de composer en marchant.
Et même Rimbaud, l’enfant prophète, était un marcheur. Je me souviens de Sensation : « Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers… » Les cent pas, le va-et-vient, et surtout, être assis le moins possible. Nietzsche assurait qu’il ne faut ajouter foi à une idée qui ne serait pas venue en plein air, alors qu’on se meut librement. « Il faut que les muscles eux aussi célèbrent une fête. Tous les préjugés viennent des intestins. Le cul de plomb — je l’ai déjà dit — c’est le véritable péché contre le saint-esprit. » L’écriture vient aux cerveaux oxygénés.